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ARmorial Monumental du Moyen-Âge
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Tours, couvent des Cordeliers

 

Le couvent des Cordeliers de Tours était situé à l’est de l’ancienne cité qui, au XIIIe siècle, occupait le bourg de Châteauneuf. C’est à cet endroit que, selon les Grandes Chroniques de Tours, Payen Hemenard (ou Hermenard), un bourgeois de la ville, fonda en 1224 un couvent et une église pour les Franciscains sur une parcelle qui dépendait du fief de l’abbaye de Saint-Julien (Salmon 1854, p. 155). L’implantation des Frères Mineurs à Tours aurait été encouragée par l’archevêque de la ville Jean de Faye (1208-1227), aussi désigné comme l’initiateur du projet par le chanoine Maan (1667, p. 134 ; Mabire La Caille 1981, p. 33). Leur couvent était, donc, l’un des plus anciens édifiés en France. Sa construction débuta en effet peu après celle du couvent des Cordeliers de Paris et son plan reprit celui du couvent des Jacobins de Tours, édifié dans la même décennie (Mabire La Caille 1981, p. 17).

Tours, couvent des Cordeliers, portail occidental.

À l’origine, l’église conventuelle fondée par Payen Hemenard était constituée d’un vaisseau unique à trois travées, terminé par un chevet plat et flanqué au nord d’une chapelle. Selon l’auteur anonyme d’une compilation de notes du XVIIe siècle, l’on pouvait encore voir à son époque la représentation du donateur à genoux dans les vitres du chœur accompagnée par les mots : « Bourgeois de Tours » (BM Tours, ms. 1217, cité par Mabire La Caille 1981, p. 33). La construction se poursuit à la fin du XIIIe siècle en agrandissant l’ensemble initial vers l’ouest au moyen d’une nouvelle nef à trois travées, bordée au sud d’un bas-côté. L’église de Payen Hemenard devient alors le chœur de ce nouvel édifice bien plus imposant. D’abord pillé et partiellement détruit en 1561 lors des Guerres de Religion, l’ensemble conventuel, alors en ruine, fut vendu comme bien national en 1791 (Giraudet 1873, p. 235). En 1794, l’église fut transformée en salle de spectacle puis entièrement détruite en 1868 pour construire un théâtre (base POP).
Les sources médiévales sur le couvent des Cordeliers sont malheureusement très lacunaires et ne permettent pas d’avoir davantage d’information sur le complexe conventuel médiéval : les quelques archives épargnées avaient principalement été dispersées dans la Bibliothèque municipale de Tours mais les manuscrits conservés disparurent lors de l’incendie de juin 1940 (Mabire La Caille 1981, p. 14) et, dans l’état actuel des connaissances, il n’existe aucun relevé de l’édifice réalisé avant les destructions. Les derniers vestiges du complexe conventuel sont ainsi représentés par la porte occidentale de l’église, qui donne aujourd’hui sur la rue Voltaire (un axe percé dans la première moitié du XXe siècle), et par quelques pans de murs des bâtiments au nord du cloître, dénués d’ornements. Lors du dégagement de la façade ouest de l’église des Cordeliers en 1958, une plaque armoriée a été retrouvée sur le seuil et remployée au-dessus de l’arc brisé de l’ancienne porte de l’église (armoirie 1) (base POP). Le relief en calcaire présente deux anges agenouillés, dont les vestes présentent quelques traces de peintures ocre et brune, tenants un écu bûché. L’état très fragmentaire de l’ensemble ne permet pas de lire facilement les armoiries initialement taillées, mais l’on devine encore le profil d’une fleur de lis dans la partie inférieure de l’écu. Il est donc plausible que celui-ci portait les armes de France et qu’il fut endommagées délibérément, à l’instar des têtes des deux tenants, lors des Guerres de Religion ou à la Révolution.

Ecu aux armes de France, soutenu par deux anges. Tours, couvent des Cordeliers, portail occidental.

Deux hypothèses ont été avancées concernant l’emplacement d’origine de cette pierre armoriée : elle aurait pu appartenir au soubassement d’un monument funéraire ou bien constituer un élément de décor de la façade (base POP ). En effet, il est important de rappeler que les couvents des ordres mendiants étaient fréquemment choisis par les élites urbaines de la fin du Moyen Âge pour leur sépulture. Le couvent des Cordeliers de Tours ne faisait pas exception. Charles de Grandmaison, à propos de cet édifice, insiste sur le fait que « les plus grands et les plus saints personnages voulaient avoir une tombe dans l’église des disciples de Saint-François (…) » (Grandmaison 1979, p. 102). Par ailleurs, l’établissement reçut en 1498 des donations de plusieurs familles nobles pour construire de nouvelles chapelles funéraires (ibid., p. 153). Le registre des fondations du couvent, conservé aux archives départementales d’Indre-et-Loire (H 651, f. 92), consigne les noms des principales familles bienfaitrices qui élurent sépulture au couvent des Cordeliers à la fin du XVe siècle, tells celles de Vendôme, de Maillé, d’Amboise et de l’Isle-Bouchard. Si l’analyse formelle de la plaque armoriée, et notamment des anges qui soutiennent l’écu, nous permet effectivement de situer son exécution à la fin du XVe siècle, il semblerait étonnant qu’elle ait appartenu à un décor de tombeau. La forme de la pierre sculptée, surement plus développée à l’origine dans la partie supérieure, et la présence des armes de France suggèrent en effet que le relief était intégré dans l’architecture de l’édifice. S’il est aujourd’hui impossible de déterminer si l’écu était orné d’un élément supplémentaire, il est néanmoins plausible qu’il était timbré d’une couronne suivant un schéma bien attesté sur d’autres pierres aux armes royales placées en façade (voir Poitiers, maison des trois clous).

La représentation des armoiries royales dans un édifice religieux était fréquente en France à la fin du Moyen Âge. Celles-ci ne témoignaient pas nécessairement d’une commande de la part du roi, mais pouvaient très souvent attester de la protection royale de l’édifice. Notons qu’une autre pierre, avec semblerait-il les mêmes caractéristiques stylistiques, est visible au pignon extérieur de la troisième chapelle sud de la cathédrale Saint-Gatien de Tours : malgré son état très lacunaire, il est probable qu’elle portait également les armes du roi timbrées d’une couronne. Enfin, une troisième pierre, figurant les armes des Bourbon tenues par deux anges, a été remployée sur la façade moderne d’un édifice en rue de la Bazoche. À ce stade de la recherche, nous ne disposons pas suffisamment d’informations pour reconnaître à quel monument elle pouvait appartenir. Cependant, il est significatif de constater la récurrence à trois reprises d’un modèle similaire à quelques centaines de mètres de distance. Cette mise en signe semble refléter une stratégie visant à mettre à l’honneur le souverain et ses proches, tout en exaltant les relations entre les institutions religieuses et le pouvoir royal.

Auteur : Sarah Héquette

Pour citer cet article

Sarah Héquette, Tours, couvent des Cordeliers, https://armma.saprat.fr/monument/tours-couvent-des-cordeliers/, consulté le 21/11/2024.

 

Bibliographie études

Giraudet Eugène, Histoire de la ville de Tours, Tours 1873.

Grandmaison Charles de, Tours archéologique. Histoire et monuments, Paris 1879.

Mabire La Caille Claire, « Evolution des enclos conventuels des mendiants à Tours (XIIIe-XVIIIe s.) », Recherches sur Tours, 1, 1981, p. 13-72.

Salmon André, Recueil de chroniques de Touraine, Tours 1854.

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Tours, couvent des Cordeliers. Armoirie roi de France ? (armoirie 1)

D'(azur) à (trois fleurs de lis) d'(or) ?

  • Attribution : Roi de France
  • Tenants / Supports : Deux anges
  • Position : Inconnue
  • Pièce / Partie de l'édifice : Inconnue
  • Emplacement précis : Inconnu
  • Support armorié : Pierre sculptée
  • Structure actuelle de conservation : Déplacée dans le même monument
  • Technique : Sculpture en pierre polychrome
  • Période : 1476-1500
  • Dans le monument : Tours, couvent des Cordeliers

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