ArmmA

ARmorial Monumental du Moyen-Âge
Afficher la recherche

Rechercher dans le site

Recherche héraldique

Néons-sur-Creuse, pièce erratique (manoir de la Bonnelière)

 

Cette pierre armoriée a été retrouvée, au début des années 2000, à l’occasion de travaux réalisés à l’intérieur du manoir de la Bonnelière à Néons-sur-Creuse, fief connu depuis le début de l’Epoque moderne et relevant de la baronnie d’Angles-sur-l’Anglin. La pièce sculptée se trouvait retournée à même le sol de la maison (communication Stéphane Monce). Elle présente un écu en chanfrein, orné de rubans, typique de la première Renaissance poitevine : nous pouvons voir des exemplaires similaires parmi les reliefs faisant jadis partie du décor du château de Bonnivet (maintenant au Musée Sainte-Croix de Poitiers) et d’autres édifices de la région (Poitiers, maison rue de la Regratterie) (armoirie 1). La composition héraldique est tout à fait originelle : l’armoirie présente un lion passant, probablement à l’origine de sinople comme les fragments de couleur laissent croire, surmonté en chef, à dextre, par une étole ou un manipule, et à senestre, par un alérion (l’oiseau, qui rassemble à une aigle, ne présente en effet ni bec ni pieds). Nous sommes portés à attribuer, avec Stéphane Monce, cette armoirie à un membre de la famille poitevine des Chasteigner, bien documentée dans cette partie de la région : une branche du lignage était titulaire de la seigneurie assez proche de la Roche-Posay (les armoiries familiales sont reproduite dans l’église du village), René Chasteigner († 1565) avait été abbé du monastère de la Merci-Dieu, tandis que Léon, abbé de Saint-Hilaire et de Nanteuil-en-Vallée, avait été également abbé de Fontgombault († 1537).

Armoirie Jean III Chasteigner ( ?). Néons-sur-Creuse (la Bonnelière), pièce erratique (cliché S. Monce).

Pourtant, la famille Chasteigner ne semble pas avoir eu des liens avec cette maison forte (Benarrous 2016), qui, d’après l’étude d’un châssis de fenêtre retrouvé quasiment intact (Tiercelin), a été sans doute complétée au plus tard dans les années 1550-1575. Les armoiries reproduites sur la lucarne en façade indiquent que, à l’époque de sa construction, l’édifice appartenait à Catherine Berland et François de Grailly (Stéphane Monce, communication orale) : nous pouvons en effet identifier dans l’écu qui en timbre le tympan un mi-parti portant à senestre, place normalement occupée par les armes de la femme, les armes de Berland (Gouget 1866, p. 202). Totalement illisible est en revanche l’armoirie qui était probablement représentée dans l’écusson ovale ornant le linteau de la porte d’entrée : par la forme du support et de son encadrement, il semble plutôt dater du XVIIe siècle. La ferme actuelle représente le vestige d’une maison forte plus ample dont les corps de bâti ont été en partie détruit après 1894 (à cette époque des bâtiments signalés sur le cadastre de 1812 sont encore documentés par une photographie) (Benarrous 2016). Même si nous ne pouvons pas exclure que la pièce en question était encastrée dans le mur de ces corps de bâti disparus, il nous semble plus probable – en raison aussi de la qualité non négligeable de la sculpture, en contraste avec la nature modeste de cette résidence – qu’elle provienne d’un édifice des alentours présentant des mémoires héraldiques de la famille d’où elle a été prélevée pour des raisons qui nous échappent. Les présences héraldiques de la famille dans la partie orientale du Poitou étaient d’ailleurs assez nombreuses, comme l’attestent les sources écrites décrivant, par exemple, celles jadis visibles dans l’abbaye de la Merci-Dieu.

Néons-sur-Creuse (la Bonnelière, détail de la lucarne timbrée des armes mi-partie de Grailly ( ?) et de Berland (cliché : S. Monce).

L’identification du propriétaire de l’armoirie permettrait probablement de résoudre également l’énigme de sa provenance. A ce stade, à défaut d’autres documents, nous ne pouvons toutefois formuler que des hypothèses à ce sujet. Les deux meubles posés en chef fournissent des indices importants. La figure placée à dextre, assez proche d’une étole, laisserait penser à une enseigne de fonction d’un abbé. Toutefois, aucun abbé de la famille Chasteigner semble avoir porté d’armoiries de ce type, se limitant à utiliser les armes pleines de la famille posées éventuellement sur une crosse (voir abbaye de la Merci-Dieu). De plus, nous n’avons pas connaissance d’armoiries d’abbé portant une telle enseigne. L’alérion placé à senestre semble alors fournir un indice plus probant. Comme Stéphane Monce nous suggère, trois alérions (alias trois aigles) formaient en effet l’armoirie des seigneurs de Preuilly, dont Louise avait épousé Geoffroy Chasteigner († 1429), comme nous aurions pu le voir sur les monuments funéraires jadis placés dans l’abbaye de la Merci-Dieu. Les Chasteigner récupérèrent, d’abord, une partie, puis l’intégralité de cette seigneurie au cours du XVIe siècle. Jean III Chastaigner († 1567), seigneur de la Roche-Posay, obtint en 1552 un tiers de la baronnie qui passa par la suite à son fils François (Chalmel , p. 239-240). En raison de la chronologie de la pièce, l’armoirie pourrait donc être attribuée, avec la plus grande prudence, à Jean III Chasteigner : l’alérion témoignerait donc la possession partielle de cette baronnie.

Auteur : Matteo Ferrari

Pour citer cet article

Matteo Ferrari, Néons-sur-Creuse, pièce erratique (manoir de la Bonnelière), https://armma.saprat.fr/monument/neons-sur-creuse-piece-erratique-manoir-de-la-bonneliere/, consulté le 09/10/2024.

 

Bibliographie études

Benarrous, Renaud, Bonnelière : maison forte et ferme, num. dossier IA36010075, 2016 <  https://patrimoine.regioncentre.fr/gertrude-diffusion/dossier/bonneliere-maison-forte-et-ferme/bc2f0e6e-1caf-4465-a60b-966a48be22a1 >

Chalmel, Jean-Louis, Histoire de Touraine, t. 3, Tours 1828.

Gouget, Alexandre, Armorial du Poitou, Niort 1866.

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Néons-sur-Creuse, pièce erratique (manoir de la Bonnelière). Armoirie Jean III ( ?) Chasteigner (armoirie 1)

D'(argent) au lion passant de sinople, accompagné en chef d’une étole (ou maniple) de … et d’un alérion d'(azur ?).

  • Attribution : Chasteigner Jean III
  • Position : Inconnue
  • Pièce / Partie de l'édifice : Inconnue
  • Emplacement précis : Inconnu
  • Support armorié : Inconnu
  • Structure actuelle de conservation : Lieu inconnu
  • Technique : Relief en pierre peint
  • Période : 1526-1550 ; 1551-1600
  • Dans le monument : Néons-sur-Creuse, pièce erratique (manoir de la Bonnelière)

Recherche

Menu principal

Haut de page