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ARmorial Monumental du Moyen-Âge
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Nouaillé-Maupertuis, abbaye Saint-Junien

 

Placée à une dizaine de kilomètres au sud-ouest de Poitiers, l’abbaye de Nouaillé apparaît une première fois dans un document daté de 678-697. Elle fut probablement fondée dans la deuxième moitié du VIIe siècle par Chrocelmus, abbé de Saint-Hilaire de Poitiers, et dans les mêmes années recépa la celle de Mazerolles, par l’évêque de Poitiers (Crozet 1939, p. 265). Passée à la règle bénédictine à la fin du VIIIe siècle et devenue indépendante de la collégiale de Saint-Hilaire, au début du IXe siècle l’abbaye connut une phase de développement et une importance croissante. En 830 Godolin, premier abbé en titre de Nouaillé, fait reconstruire l’église et la dota de nouvelles reliques, provenant du monastère de Mairé (Deux-Sèvres), qui devint sa dépendance (Crozet 1939, p. 267). Parmi celles-ci il y avait le corps de saint Junien dont le culte s’amplifia dans les années suivantes autant qu’il devint le saint patron de l’abbatiale (Petit 1997, p. 18). Peut-être ruiné par les invasions normandes des années 860, le monastère adhéra à la reforme clunisienne vers 1011 et fut renouvelé à partir du début du XIe siècle ; cependant des travaux importants furent encore réalisé dans la nef et dans la façade vers le milieu du XIIe siècle : les appareils montrent clairement plusieurs reprises, tandis que les éléments architectoniques et du décor appartiennent à ce dernier chantier. Des nouvelles intervention datent enfin du XIIIe siècle, quand tout l’ensemble fut fortifié. A cette dernière époque l’abbaye bénéficia des donations de grandes familles locales, comme Amélie Morthemer et Hugues X de Lusignan qui y furent enterrés (Dom Fonteneau, t. LXX, p. 64, 73 cité par Crozet 1939, p. 268).

Pillée par les anglo-gascons en septembre 1356, l’abbaye connut une phase de splendeur nouvelle dans le seconde moitié du XVe siècle, sous l’abbatiat de Raoul du Fou (1468-1511). Evêque de Périgueux et puis de Angoulême et d’Evreux, il fut un humaniste bibliophile, un mécène raffiné et un grand bâtisseur (Favreau s.d.), comme l’était son frère Yves, sénéchal du Poitou (voir notice). Pendant son abbatiat Raoul commandita la construction de plusieurs constructions à l’intérieur du monastère qu’il présidait et dont il tirait une rente considérable (Acin 1992-1993, p. 79-80). Ces investissements monumentaux intéressaient également certaines dépendances de l’abbaye (par exemple, le prieuré d’Availles).

Le logis abbatial, placé sur le coin nord occidental de l’enceinte abbatiale, constitue seulement une des ajoutes de cette phase de renouvellement, certainement aujourd’hui la plus évidente. Raoul du Fou intervint même dans les espaces annexes à l’église abbatiale. A la fin du XVe siècle, il fait ainsi construire une nouvelle sacristie, collée au mur pignon du bras méridional du transept. L’héraldique scelle les œuvres réalisées par l’abbé. Du coté de l’église, la porte d’accès à la salle est mise en évidence par un écu sculpté en relief, collé à une crosse et surmonté, sur la gauche, d’une mitre dont un fanon est encore visible sur le coté gauche  (armoirie 1a). Aucun élément de l’armoirie originelle est aujourd’hui reconnaissable, puisque le bouclier a été bûche dans un moment imprécis, peut-être déjà au cours du pillage réalisé en 1569 par les bandes de Coligny. Il est toutefois plausible qu’il portait les armes du constructeur de la sacristie. En effet, à l’intérieur, les clefs de voûtes des deux travées qui couvrent la salle, orientée sur l’axe est-ouest, affichent encore l’armoirie de Raoul du Fou (Crozet 1939, p. 290 ; Acin 1992-1993, p. 22) (armoiries 1b-c). Bien que mutilées, les armes de l’abbé sont aisément reconnaissables (Petit 1997, p. 63).

Il est probable que les armories de l’abbé constructeur étaient représentées même dans les autres bâtiments qu’il avait commandités ou réaménagés. C’est le cas, par exemple, de la chapelle Notre-Dame, construite au XIIIe siècle et qu’il dota d’une nef à deux travées (Acin 1992-1993, p. 21). La chapelle servit longtemps comme lieu de sépulture des abbés et qui fut détruite après la Révolution. Ses voutes d’ogive aurait pu clairement porter les armes du commanditaire. D’ailleurs cette attitude à parsemer les bâtiments de peintures ou sculptures à ses propres armes constituait répondait à une stratégie de marquage héraldique très répandue parmi l’haut clergé poitevin de l’époque (voir abbaye de Ligugé).

Toutefois, rien n’est plus aujourd’hui visible, certainement même à cause des événements malheureux qui intéressèrent successivement l’abbaye, occupée en 1569 par les soldats de Coligny qui la saccagèrent et lui donnèrent feu. Probablement après cet avènement, l’abbé Jean de Mareuil fit faire d’importants travaux au logis abbatial, au cloître et à la partie voisine au dortoir, où il fit placer ses armoiries (Crozet 1936-38, p. 722), mais il ne nous a pas été possible d’en vérifier l’existence. D’autres armoiries, plus modernes, se trouvent enfin dans les clefs de voute des chapelles latérales, mais elles furent ajoutées vers la fin du XVIIe siècle, quand l’architecte Jaques Beziau fut chargé de renouveler le transept et de tout couvrir avec des voûtes d’ogives (Crozet 1936-1938 ; Crozet 1939, p. 270-271).

Auteur : Matteo Ferrari

Pour citer cet article

Matteo Ferrari, Nouaillé-Maupertuis, abbaye Saint-Junien, https://armma.saprat.fr/monument/abbaye-saint-junien-nouaille-maupertuis/, consulté le 21/11/2024.

 

Bibliographie études

R. Crozet, « Notes et documents sur les monuments religieux de Nouaillé du XVe au XVIIIe siècle », dans Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest, s. 3, 11, 1936-1938, p. 722-733.

R. Crozet, « Nouaillé », dans Bulletin monumental, 3-4, 1939, p. 265-297.

J.-L. Acin, St. Junien de Nouaillé, mémoire de maîtrise, Université de Poitiers, dir. de R. Favreau, 1992-1993.

R. Petit, Nouaillé-Maupertuis au fil du temps, Nouaillé-Maupertuis 1997.

R. Favreau, « Raoul du Fou, un prélat mécène » http://patrimoine.bm-poitiers.fr/EXPLOITATION/Patrimone/robert-favreau.aspx (consulté 8 octobre 2014).

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Nouaillé-Maupertuis, abbaye Saint-Junien. Armoirie Raoul du Fou (armoirie 1a)

(D’azur à la fleur de lys d’or, sommée de deux éperviers affrontés d’argent).

Timbre : une crosse d’abbé, une mitre.

  • Attribution : Armoirie bûchée ; Du Fou, Raoul
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Eglise ; Transept (bras sud)
  • Emplacement précis : Porte
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Relief en pierre
  • Période : 1476-1500
  • Dans le monument : Nouaillé-Maupertuis, abbaye Saint-Junien

Nouaillé-Maupertuis, abbaye Saint-Junien. Armoirie Raoul du Fou (armoirie 1b)

(D’azur à la fleur de lis d’or sommée de deux éperviers affrontés d’argent).

  • Attribution : Du Fou, Raoul
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Sacristie
  • Emplacement précis : travée Ière ; Voûte
  • Support armorié : Clef de voûte
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Relief en pierre
  • Période : 1476-1500
  • Dans le monument : Nouaillé-Maupertuis, abbaye Saint-Junien

Nouaillé-Maupertuis, abbaye Saint-Junien. Armoirie Raoul du Fou (armoirie 1c)

(D’azur à la fleur de lis d’or sommée de deux éperviers affrontés d’argent).

  • Attribution : Armoirie bûchée ; Du Fou, Raoul
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Sacristie
  • Emplacement précis : travée IIème ; Voûte
  • Support armorié : Clef de voûte
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Relief en pierre
  • Période : 1476-1500
  • Dans le monument : Nouaillé-Maupertuis, abbaye Saint-Junien

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