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ARmorial Monumental du Moyen-Âge
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Paris, Hôtel Jouvenel des Ursins

 

Jadis placé sur la partie nord-orientale de l’île de la Cité, vraisemblablement formé par plusieurs corps de bâtiments, l’hôtel des Ursins donnait directement sur la Seine. Vers 1401-03 (Batiffol 1889, p. 548) ou, plutôt, entre mars 1403 et juillet 1404 (Lewis 1999, p. 128) Jean Jouvenel des Ursins († 1431), prévôt des marchands, s’installa dans une résidence placée à cet endroit, agrandie au début des années 1440 à l’initiative de son fils Jacques (ibid., p. 131). Cet hôtel fit à nouveau l’objet de réaménagements au début du XVIe siècle (probablement dans les années 1520), quand une terrasse soutenue par trois arcades et flanquée par deux tourelles en saillie fut adossée au logis donnant vers le fleuve (Thomson 1984, p. 60-62).

Anonyme, Procession de la Ligue en 1590 ou 1593, détail. Paris, Musée Carnavalet.

L’hôtel ainsi transformé apparaît sur le fond du tableau représentant la procession de la Ligue, sortant de l’arcade Saint-Jean de l’Hôtel de Ville en 1590 ou 1593, peint à la fin du XVIe siècle (Paris, Musée Carnavalet, inv. P 262) : les hautes toitures et les tourelles rondes, typiques de l’architecture gothique, renferment la terrasse réalisée selon le goût de la Renaissance (mais des doutes ont été avancés sur la fiabilité des représentations anciennes de cet édifice : Bove 2011, p. 179-180).

En 1632 l’hôtel fut en effet vendu par François Jouvenel des Ursins à une société formée par Aimé Sirou, René Fleury et Jean Desmerets. Dans le cadre d’un processus général de rénovation du quartier de la Cité organisé durant la première moitié du XVIIe siècle, ces derniers donnèrent vie à un plan de lotissement intéressant l’aire occupée par l’ancienne demeure et par une maison attenante, afin de construire cinquante maisons à leur place (ensuite réduites à trente-quatre, puis à vingt-six). Les travaux de démolition de l’hôtel des Ursins commencèrent en juin 1634, mais les opérations avancèrent lentement à cause de la crise financière déclenchée par la guerre contre l’Espagne initiée en 1635 (Lavopa 2012). En 1640, l’ancien édifice avait en tout cas désormais disparu et une « quantité de beaux et grands logis » se dressaient désormais à sa place (Malingre 1640, p. 60). Le secteur fut enfin bouleversé par le grand plan de transformation urbaine réalisé au cours de la première moitié du XIXe siècle : pour l’aménagement du nouveau quai et l’élargissement des rues des maisons furent détruites, d’autres mises à l’alignement (Lavopa 2012). Finalement, dans les années 1870 toutes les maisons construites sur l’aire autrefois occupée par l’hôtel des Ursins furent rasées pour faire place à l’Hôtel Dieu, qui fut achevé en 1878 (ibid.).

Hotel des Ursins, la gallerie(Lénoir 1867, t. 2).

Les travaux de dégagement et les fouilles réalisés en prévision de la construction de ce bâtiment en 1866-67 permirent de dégager les fondations de l’ancien édifice et d’en récupérer certains éléments sculptés (Lénoir 1867, t. 2, pl. XIX). Parmi ces derniers se trouve un chapiteau de sous poutre portant deux écussons armoriés, disposés de part et d’autre (Paris, Musée Carnavalet, inv. AP 409). L’un est chargé des armoiries de la famille des Jouvenel qui utilisaient les mêmes armes des Orsini de Rome, d’où ils prétendaient descendre (armoirie 1). L’autre a été en revanche martelé, résultant ainsi quasiment illisible : l’extrémité d’une bande nous laisse croire toutefois qu’il portait les mêmes armes (armoirie 2). Déjà daté du XVe siècle (Wiellesme 1979, p. 62, num. 30) et attribué à la reconstruction de Jean Jouvenel (Hamon 2012, p. 208), il semblerait plutôt dater du début du XVIe siècle. Il pourrait donc avoir appartenu soit à la gallerie donnant sur le fleuve, soit à une des celles ouvertes sur la cour intérieure (par sa base circulaire, le chapiteau devait couronner une colonne). Des relevées datant du XVIIIe siècle nous font connaître les formes d’une structure qui fut de toute évidence épargnée par le chantier qui avait investi la zone dans les années 1630. Dans un style emprunté à la Renaissance italienne, cette bâtisse visait probablement à célébrer les origines italiennes prétendues des Jouvenel qui, à cette époque, ajoutaient depuis presqu’un siècle (Batiffol 1889) le nom Orsini à leur nom de famille (Thomson 1984, p. 62).

Chapiteau aux armes des Jouvenel des Ursins. Paris, Musée Carnavalet.

D’après les planches publiées par Lenoir en 1867, d’autres éléments ornaient les arcades qui clôturaient la cour sur le côté nord, vers la Seine (Lenoir 1867, p. 247) : des médaillons avec des portraits de profils et des écus armoriés. L’un, placé dans l’écoinçon entre les arcades, est en forme de chanfrein – typique de la Renaissance – et est orné par des rubans : il porte une armoirie partie peu lisible déjà à l’époque de Lenoir (armoirie 3). L’autre, dont l’emplacement n’est pas connu, semble porter la même armoirie, même si le relevé est, dans ce cas, encore moins précis (armoirie 4) (nous ne trouvons d’ailleurs aucune ressemblance avec les armes Foscarini comme l’indique Thomson 1984, p. 62). Par la forme de l’écu elle pourrait dater également d’une époque un peu plus ancienne.

Auteur : Matteo Ferrari

Pour citer cet article

Matteo Ferrari, Paris, Hôtel Jouvenel des Ursins, https://armma.saprat.fr/monument/paris-hotel-des-ursins/, consulté le 21/11/2024.

 

Bibliographie études

Batiffol, Louis, « Le nom de la famille Jouvenal des Ursins », Bibliothèque de l’Ecole des chartes, 50, 1889, p. 537-558.

Bove, Boris, « À la recherche des hôtels princiers de Paris : un inventaire impossible ? », dans M. Gaude-Ferragu, B. Laurioux, J. Paviot (éd.), La cour du prince. Cour de France, Cours d’Europe (XIIIe-XVe siècle), Paris 2011, p. 177-192.

Hamon, Etienne, Le décor monumental de la demeure, dans La demeure médiévale à Paris, Paris 2012, p. 207-211.

Lavopa, Alessandro, « Le lotissement de l’hôtel des Ursins. Pratiques sociales et changement urbain (1632-1640) », Bulletin de la Société d’histoire de Paris et de l’Île-de-France, 2012, p. 25-58.

Lenoir, Albert, Statistique monumentale de Paris, t. 1. Explication des planches, Paris 1867.

Lewis, Peter, « L’Hôtel des Ursins », dans J. Kerhervé, A. Rigaudière (dir.), Finances, pouvoirs et mémoire. Mélanges offerts à Jean Favier, Paris 1999, p. 127-135.

Malingre, Claude, Les antiquitez de la ville de Paris, Paris 1640.

Thomson, David, Renaissance Paris : Architecture and Growth, 1475-1600, Berkeley 1984.

Willesme, Jean-Pierre, Catalogues d’art et d’histoire du Musée Carnavalet, I. Sculptures médiévales (XIIe siècle-début du XVIe siècle), Paris 1979.

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Paris, Hôtel des Ursins-en-la-Cité. Armoirie Jouvenel des Ursins (armoirie 1)

Bandé d'(argent) et de (gueules) de six pièces, au chef d'(argent) soutenu d'(or) et chargé d’une rose de (gueules).

  • Attribution : Jouvenel des Ursins, famille
  • Position : Extérieur
  • Étage : Rez-de-chaussée
  • Pièce / Partie de l'édifice : Galerie
  • Emplacement précis : Colonne
  • Support armorié : Chapiteau
  • Structure actuelle de conservation : Paris, Musée Carnavalet
  • Technique : Relief en pierre
  • Période : 1501-1525
  • Dans le monument : Paris, Hôtel Jouvenel des Ursins

Paris, Hôtel des Ursins-en-la-Cité. Armoirie bûchée (armoirie 2)

(Bandé d’argent et de gueules de six pièces, au chef d’argent soutenu d’or et chargé d’une rose de gueules).

  • Attribution : Armoirie bûchée ; Jouvenel des Ursins, famille
  • Position : Extérieur
  • Étage : Rez-de-chaussée
  • Pièce / Partie de l'édifice : Galerie
  • Emplacement précis : Colonne
  • Support armorié : Chapiteau
  • Structure actuelle de conservation : Paris, Musée Carnavalet
  • Technique : Relief en pierre
  • Période : 1501-1525
  • Dans le monument : Paris, Hôtel Jouvenel des Ursins

Paris, Hôtel des Ursins-en-la-Cité. Armoirie illisible (armoirie 3)

Armoirie partie …

  • Attribution : Armoirie illisible ; Armoirie inconnue
  • Position : Extérieur
  • Étage : Rez-de-chaussée
  • Pièce / Partie de l'édifice : Galerie
  • Emplacement précis : Ecoinçon
  • Structure actuelle de conservation : Pièce disparue
  • Technique : Relief en pierre
  • Période : 1501-1525
  • Dans le monument : Paris, Hôtel Jouvenel des Ursins

Paris, Hôtel des Ursins-en-la-Cité. Armoirie illisible (armoirie 4)

Parti …

  • Attribution : Armoirie illisible ; Armoirie inconnue
  • Position : Extérieur
  • Étage : Rez-de-chaussée
  • Pièce / Partie de l'édifice : Galerie
  • Emplacement précis : Inconnu
  • Structure actuelle de conservation : Pièce disparue
  • Technique : Relief en pierre
  • Période : 1451-1475 ; 1476-1500 ; 1501-1525
  • Dans le monument : Paris, Hôtel Jouvenel des Ursins

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