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ARmorial Monumental du Moyen-Âge
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Paris, Porte Saint-Denis

 

Dans la partie nord de l’enceinte urbaine de la ville de Paris, une porte était ouverte sur l’axe routier conduisant vers la basilique royale Saint-Denis depuis le Xe siècle. Chaque reconstruction des remparts urbains, élargis dans ce secteur d’abord sous Philippe Auguste (1190-1209) puis sous Charles V (à partir de 1358), entraîna l’édification d’un nouvel accès fortifié. La bastide Saint-Denis, érigée dans la deuxième moitié du XIVe siècle, se trouvait une soixantaine de mètres au sud par rapport à l’arc de triomphe actuel qui, en 1672, en repris la fonction d’accès triomphale à la capitale. Encore visible sur le plan de Truschet et Hoyau (vers 1550), la troisième porte Saint-Denis était constituée par une structure fortifiée quadrangulaire, organisée autour d’une cour intérieure, et munie d’une échauguette à chaque canton (comme le documente une eau-forte de Israël Silvestre datant de 1652 : Paris, Musée Carnavalet, inv. G 425).

Israël Silvestre, La porte Saint-Denis, 1652. Paris, Musée Carnavalet, inv. G 425.

D’après l’enluminure réalisée par Jean Fouquet vers 1455-1460 (Paris, BnF 6465, f. 417r), illustrant l’entrée de Charles V en ville après le couronnement de Reims, des toitures coniques couronnaient ces éléments architecturaux (elles ne sont toutefois pas représentées dans l’enluminure du f. 444r du même manuscrit, figurant la rencontre entre Charles V et l’empereur Charles IV) (voir aussi Bonnardot 1852, p. 252-255).

Placée sur la route qui menait à la basilique Saint-Denis, cette porte était strictement liée aux cérémonieux royaux : par ici les rois faisaient leur première entrée solennelle et ils en sortaient, au moment de leurs funérailles, pour rejoindre leur demeure éternelle dans la crypte royale de la basilique Saint-Denis. En raison de sa valeur symbolique et de son lien avec la royauté, cette porte constituait donc un lieu privilégié pour des rencontres officielles, pour l’accueil des autorités et pour la mise en scène de tableaux vivants à l’occasion des entrées solennelles de rois et princes. Probablement en raison aussi de sa fonction dans les rituels de la cour, cette porte pouvait vanter un apparat ornemental d’une certaine ampleur. D’après les deux enluminures de Jean Fouquet susmentionnées, suivant une pratique commune à ce type de bâtiments marquant les limites (physiques, administratives et symboliques) de la ville, la façade extérieure de la porte aurait été ornée, au milieu du XVe siècle, par des images de saints (une statue de la Vierge ornait également la porte Saint-Denis de l’enceinte de Philippe Auguste d’après Sauval 1724, p. 31).

Jean Fouquet, Entrée de Charles V à Paris après son couronnement. Paris, BnF 6465, f. 417r.

Trois statues en forte saillie étaient placées à l’intérieur de trois niches surmontant le portail et protégées par trois dais gotiques. Au milieu se trouvait saint Denis (Babeau 1897, p. 45), portant sa tête dans ses mains selon l’iconographie habituelle, accompagné d’un côté et d’autre soit par les figures d’un évêque et d’un diacre (Paris, BnF, ms. 6465, f. 417r), soit par deux diacres (ibid., f. 444r). Le manque de cohérence dans les deux images ne doit pas surprendre. Si les enluminures s’inspirent sans doute à des éléments réels, il serait en effet erroné de leur attribuer le statut d’une représentation exacte des édifices de l’époque. D’après la représentation de la rencontre entre Charles V et l’empereur (ibid., f. 444r), la partie sommitale de la porte était également ornée par une image héraldique – probablement un relief peint – représentant l’écu de France moderne, couronné et tenu par deux anges (armoirie 1).

Même à défaut de preuves documentaires, la mise en signe per l’héraldique des portes de la ville de Paris (tout comme celles des autres villes du royaume : voir la Porte de la Tranchée à Poitiers) semble confirmée par une autre enluminure, toujours figurant la rencontre entre Charles V et l’empereur d’Allemagne, dans un manuscrit des Chroniques de Jean Froissart (Paris, BnF, ms., 2646, f. 6r). La porte Saint-Denis, représentée de manière surement bien moins réaliste, est ornée par un relief peint en or et en azur figurant un écu aux armes de France moderne, soutenu par deux anges et surmonté par un heaume couronné et cimé d’une fleur de lys carrée ; deux statues de rois, placées d’un côté et d’autre de la représentation héraldique, complètent l’ensemble. Nous ignorons en tout cas si l’armoirie du roi de France avait été représentée sur la porte Saint-Denis dès sa construction, tout comme nous ignorons de quelle époque dataient les « vers et sentences pour explication » des « diverses statues et figures qui sont faictes et dressees » sur la porte dont nous parle Jacques du Breul (1639, p. 791).

Rencontre de Charles V et de l’empereur Charles IV à la porte Saint-Denis. Paris, BnF 6465, f. 444r.

Il est en revanche probable que les armes de France avaient été rétablies seulement après la rentrée du roi dans la capitale en 1436. D’après la Chronique d’un bourgeois de Paris, au moment de l’entrée solennelle d’Henri VI d’Angleterre le 2 décembre 1431, la porte Saint-Denis était en effet ornée par une armoirie de la ville de grande taille, peinte directement sur la maçonnerie de la façade de l’édifice vers l’extérieur (armoirie 2) : « laquelle porte devers les champs avoit les armes de la ville ; c’est assavoir ung escu si grant, qu’il couvroit toutte la maçonnerie de la porte et estoit à moitié de rouge et le dessus d’azur semé de fleurs de lis, et ou travers de l’escu avoit une nef d’argent grande comme trois hommes » (Buchon 1827, p. 430).

En accord avec l’image offerte par Fouquet, au milieu du XVe siècle, l’ornementation héraldique de la porte pouvait être complétée par des girouettes ou banderoles métalliques aux armes du roi (Paris, BnF, ms. 6465, f. 417r).

Auteur : Matteo Ferrari

Pour citer cet article

Matteo Ferrari, Paris, Porte Saint-Denis, https://armma.saprat.fr/monument/paris-porte-saint-denis/, consulté le 21/11/2024.

 

Bibliographie sources

Buchon, Jean-Alexandre (éd.), Collection des chroniques nationales françaises. XVe siècle, Paris 1827.

Paris, BnF, ms. 6465, Grandes chroniques de France.

Paris, BnF, ms. 2646, Jean Froissart, Chroniques.

Bibliographie études

Babeau, Albert, « Note sur quelques vues de Paris », Bulletin de la Société de l’histoire de Paris et de l’Ile-de-France, 24, 1897, p. 42-45.

Bonnardot, Alfred, Dissertations archéologiques sur les anciennes enceintes de Paris, Paris 1852.

Du Breul, Jacques, Le thèatre des antiquitez de Paris, Paris 1639.

Gagneux, Renaud, Prouvost, Denis et Gaffard, Emmanuel, Sur les traces des enceintes de Paris, promenades au long des murs disparus, Paris 2004.

Lorentz, Philippe et Sandron, Dany, Atlas de Paris au Moyen Âge : espace urbain, habitat, société, religion et lieux de pouvoir, Paris 2006.

Sauval, Henri, Histoire et recherches des antiquités de la ville de Paris, t. 1, Paris 1724.

 

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Paris, Porte Saint-Denis. Armoirie roi de France (armoirie 1)

D’azur à trois fleurs de lys d’or, couronné.

Tenants/supports : deux anges.

  • Attribution : Roi de France
  • Position : Extérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Mur d'enceinte
  • Emplacement précis : Côté nord ; Portail
  • Support armorié : Relief
  • Technique : Relief en pierre peint
  • Période : 1451-1475
  • Dans le monument : Paris, Porte Saint-Denis

Paris, Porte Saint-Denis. Armoirie ville de Paris (armoirie 2)

(De gueules à la nef d’argent voguant sur des ondes du même mouvant de la pointe, au chef d’azur semé de fleurs de lis d’or).

  • Attribution : Ville de Paris
  • Position : Extérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Mur d'enceinte
  • Emplacement précis : Côté nord ; Portail
  • Support armorié : Relief
  • Structure actuelle de conservation : Pièce disparue
  • Technique : Relief en pierre peint
  • Période : 1426-1450
  • Dans le monument : Paris, Porte Saint-Denis

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