ArmmA

ARmorial Monumental du Moyen-Âge
Afficher la recherche

Rechercher dans le site

Recherche héraldique

Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame

 

Documentée dès le début du XIIe siècle, l’église de Morthemer fit l’objet de plusieurs campagnes de construction. Si le chevet et la crypte conservent encore leur structure romane, datée de la seconde moitié du XIe siècle, les transept, la nef et le clocher furent lourdement remaniés entre 1230 et 1250 (Durand 1979-1980, p. 355-384). D’abord placée sous la dépendance de l’évêque de Poitiers, qui la cède à l’église de Notre-Dame-et-Saint-Cyprien de Poitiers en 1110, elle n’eut jamais la fonction de chapelle castrale, mais fonctionnait comme église paroissiale et fut siège d’un collège de chanoines au moins depuis les années 1220 (ibid., p. 355-356).

Tombeau de chevalier, détail de l’écu armorié. Morthemer, église Notre-Dame.

À la phase la plus ancienne de l’édifice appartient sans doute le tombeau en dos d’âne conservé au fond de la nef, aux pieds du plus célèbre gisant de Renée Sanglier († avant 1512), femme de Mathurin Taveau qui fut co-seigneur de Morthemer de la fin du XVe siècle jusqu’à 1512 environ (Durand 1979-1980, p. 373). Une épée et un écu armorié (armoirie 1) sont gravés sur l’un de ses deux versants. L’écu présentait un chef à trois fleurs de lis, dont seulement deux sont actuellement visibles, comme cela avait déjà été indiqué par Joseph Salvini  (1966, p. 464). Le bloc de pierre servait de couvercle à un tombeau de chevalier, probablement inséré dans le dallage du sol de l’église. Comme à l’habitude dans ce type de de monument, il était orné des insignes typiques de l’adoubement chevaleresque, gravées, toutes ou en partie, sur la surface: l’épée, l’écu, la lance, l’enseigne (ibid., p. 462). La forme de l’écu, triangulaire mais encore plutôt allongée, laisserait penser à une datation comprise entre la deuxième moitié du XIIIe siècle et le début (premier quart?) du XIVe, et trouve des comparaisons possibles dans les tombeaux contemporains retrouvés dans l’église Saint-Pierre de La Trimouille et dans le cimetière de Voulon, (ibid., p. 465-466). L’emplacement originaire de la dalle n’est pas connu, de même que son propriétaire. Nous pouvons cependant exclure son appartenance à un des membres des familles qui se succédèrent à la seigneurie de Morthemer (Morthemer, De la Vergne, Chenin, Sénéchal, Taveau), dont les armoiries diffèrent toutes de celle ici reproduites (Eygun 1939, p. 135).

D’autres éléments héraldiques sont conservés dans la crypte de l’église, à l’origine un peu plus vaste et éclairée par quatre baies (Durand 1979-1980, p. 357), où sont encore visibles des larges pans des peintures murales qui, découvertes et restaurées en 1982-1983, la recouvraient intégralement au Moyen Âge (Landry-Delcroix 2012, p. 290). Un Christ en majesté, sur la voûte en berceau, et une Vierge à l’Enfant, plus en bas, à droite de l’autel, appartiennent à la campagne picturale plus ancienne, datée des années 1230-1250, à l’époque de la rénovation de l’édifice (ibid., p. 291). Les restes d’une frise végétale, visibles sur l’arcade sud, et l’écusson qui se trouve juste au-dessous (armoirie 2a), appartiennent manifestement à cette même phase (ibid.).

Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame, crypte.

Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame, crypte.

L’écu est représenté accroché à un clou, comme à l’habitude dans les décors de l’époque (peints ou sculptés), afin d’évoquer une pratique héraldique réelle, à savoir celle de suspendre des écus armoriés aux murs d’une pièce par leur guige. La reconstruction de l’armoirie originelle est malaisée en raison de son état de conservation fragmentaire et de probables altérations dues aux restaurateurs. On y reconnaît quand même un fond d’or, qui semblerait dépourvu d’autres partitions ou meubles, surmonté par un chef composé par des pals de gueules et d’azur.

Il pourrait donc s’agir de l’armoirie des Taveau, une famille de chevaliers originaire de La Marche, connue dès le milieu du XIVe siècle, dont un des membre, Guillaume, devient baron de Morthemer vers 1391 (Nadaud 1880, t. 4, p. 583 ; Fauché 1966, p. 508). Ils portaient en effet d’or, au chef de gueules chargé de deux pals de vair (Gouget 1866, p. 62). Toutefois, la forme très allongé de l’écu, presque triangulaire, et le détail du système d’accrochage ne sont pas compatibles avec une datation aussi avancée. L’écu représenté dans la crypte appartenait donc plus vraisemblablement aux Sénéchal, qui furent seigneurs de Morthemer avant les Taveau. Ces derniers en reprirent en effet les armes au moment de la succession dans la baronnie, tout en abandonnant leur enseigne primitive (Eygun 1939, p. 135 e p. 347, num. 1155), qui était à deux chevrons (ibid., p. 273, num. 762-763).

Écu aux armes des Taveau (ou Sénéchal). Morthemer, église Notre-Dame, crypte.

La ressemblance de l’écu de Morthemer avec ceux peints dans l’« Hôtellerie » de l’abbaye de Nanteuil-en-Vallée ainsi que le type de décor végétal qui le surmonte suggèrent une datation à la seconde moitié du XIIIe siècle. Il pourrait donc s’agir plus précisément des armes d’Aubert Sénéchal qui figure, d’abord, en 1267, comme vassal d’Agnès de Mortemer, puis, comme héritier de biens dans le même lieu par sa femme Agathe Chenin, enfin vers la fin du XIIIe siècle, comme successeur de Guillaume de la Vergne et de Guillaume V Chenin († vers 1276) (Beauchet-Filleau 1895, p. 380) dans la seigneurie de Mortemer (Fauché 1966, p. 504-505). Le décor de la crypte pourrait donc bien dater de cette phase de succession à la seigneurie, à savoir du dernier quart du XIIIe siècle.

Enfin, le gisant (aujourd’hui disparu) habillé d’une cotte aux armes des Sénéchal-Taveau (armoirie 2b) et décrit par Dom Fonteneau (Fauché 1966, p. 507, note 30) pourrait appartenir également à un membre de la famille Sénéchal et non pas des Taveau, comme Dom Fonteneau le croyait.

Auteur : Matteo Ferrari

Pour citer cet article

Matteo Ferrari, Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame, https://armma.saprat.fr/monument/sarcophage-morthemer-valdivienne/, consulté le 02/04/2025.

 

Bibliographie études

A. Gouget, Armorial du Poitou et état des nobles réservés dans toutes les élections de la généralité, Niort 1866.

J. Nadaud, Nobiliaire du diocèse et de la généralité de Limoges, éd. par  A. Lecler, t. 4, Limoges 1880.

H. Beauchet-Filleau, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, t. 2, Poitiers 1895.

F. Eygun, Sigillographie du Poitou jusqu’en 1515, Poitiers 1939.

M. Fauché, « Les seigneurs de Morthemer au Moyen Age », Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest, s. 4, 8, 1966, p. 501-514.

J. Salvini, « Iconographie des sépultures au Moyen Age dans le département de la Vienne », dans Bulletins de la Société des Antiquaires de l’Ouest, s. 4, t. 8, 1966, p. 461-481.

P. Durand, « Les campagnes de construction de l’église Notre-Dame de Morthemer », Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest, 4 s., 15, 1979-1980, p. 355-384.

C. Landry-Delcroix, La peinture murale gothique en Poitou, XIIIe-XVe siècle, Rennes 2012.

 

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame. Armoirie Sénéchal ? (armoirie 2b)

(D’or, au chef de gueules à deux pals de vair ?).

  • Attribution : Sénéchal, famille
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Inconnue
  • Emplacement précis : Tombeau
  • Support armorié : Gisant ; Monument funéraire
  • Structure actuelle de conservation : Pièce disparue
  • Technique : Inconnue
  • Période : Datation inconnue
  • Dans le monument : Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame

Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame. Armoirie inconnue (armoirie 1)

De … au chef chargé de (trois) fleurs de lis de …

  • Attribution : Armoirie inconnue
  • Position : Inconnue
  • Pièce / Partie de l'édifice : Inconnue
  • Emplacement précis : Tombeau
  • Support armorié : Couvercle
  • Structure actuelle de conservation : Morthemer (Valdivienne)
  • Technique : Image gravée
  • Période : 1251-1275 ; 1276-1300 ; 1301-1325
  • Dans le monument : Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame

Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame. Armoirie Sénéchal (armoirie 2a)

D’or, au chef de gueules à deux pals de (vair ?).

  • Attribution : Sénéchal, famille
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Crypte
  • Emplacement précis : Mur sud ; travée IIIème
  • Support armorié : Mur ; Mur sud
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Peinture murale
  • Période : 1276-1300
  • Dans le monument : Morthemer (Valdivienne), église Notre-Dame

Recherche

Menu principal

Haut de page