Selon Louis Charbonneau-Lassay (Charbonneau-Lassay 1996, p. 40) les armes de roi René étaient visibles à Loudun, outre que dans la chapelle latérale de l’église des Carmes, sur les piliers de la maison dite « du roi René » ou « du roi de Sicile » (Arnault-Poirier 1846, p. 186), qui se trouvait sur la voie conduisant à la Porte de Chinon. L’édifice, détruit au milieu du XIXe siècle, était doté d’une façade à colombages et avait des dimensions considérable : il comprenait cinq travées sur la rue et quatre niveaux d’encorbellement (Arnault-Poirier 1846, p. 186 ; Favreau, Bourgeois 2000, p. 58).
L.G. De la Tourelle (des.), L. Charbonneau-Lassay (leg.), armoirie de Roi René sur une poutre apparente de l’hostel du Roi de Sicile à Loudun. Loudun, Musée Charbonneau-Lassay.
L’érudit loudunais appuyait sa déclaration sur un dessin réalisé par Gilles de la Tourelle en 1867 (Charbonneau-Lassay 1996, p. 40), mais des descriptions de l’édifice antérieures aux démolitions confirment la présence de ces éléments héraldiques et en donnent l’emplacement précis. Arnault Poirier décrit l’édifice en octobre 1843, quelques jours avant la démolition de la façade, et atteste que les quatre piliers corniers conservés au rez-de-chaussée (deux desquels avaient déjà été détruits) avaient une tête qui constituait la saillie de l’étage supérieur et qui se terminait, dans la partie inférieure, en un biseau sur lequel était sculpté un écu aux armes « du bon René », duc d’Anjou et roi de Sicile et de Jérusalem (armoirie 1), à savoir « coupé d’un, parti de deux au chef et d’un à la pointe, portant trois royaumes soutenus de deux duchés, qui sont : au premier du chef de Hongrie ; au deuxième, de Naples ; au troisième, de Jérusalem ; au quatrième, qui est le premier de la pointe, d’Anjou ; au cinquième de Bar » (Arnault-Poirier 1846, p. 187). Deux de ces piliers corniers armoriés étaient encore à leur place en 1852 quand Longuemar en réalisa des dessins (Barbier de Montrault 1900, p. 6, note 3 ; Lerosey 1908, p. 157) qui n’on malheureusement pu être retrouvés (Noyelle, Rouhaut 2002, p. 84).
La même armorie avait été sculptée, comme à l’habitude, « dans une pierre au-dessus de la porte de l’escalier », du coté la cour (armoirie 2), mais elle avait été bûchée à la Révolution (Arnault-Poirier 1846, p. 187).
L.G. De la Tourelle (des.), L. Charbonneau-Lassaay (leg.), armoirie de Roi René sur un lucarne de l’hostel du Roi de Sicile à Loudun. Loudun, Musée Charboneau-Lassay.
L’armoirie décrite correspond donc à celle à cinq quartiers que René d’Anjou porta de 1453 à 1466, c’est-à-dire avant d’accepter la couronne d’Aragon et, par conséquent, avant d’introduire son emblème en cœur dans ses armes (le sceau avec la nouvelle armoirie à six quartiers ne fut prêt qu’en février 1467 ; Mérindol 1987, p. 71, 149 et Id. 2009, p. 155; un écusson sculpté à ces armes est conservé au Musée d’Angers). Cette même armoirie apparaissait, cimée d’un casque couvert par un lambrequin ondoyant, sur une lucarne du même édifice (armoirie 3). Le relief était encadré par deux pinacles fleuris et une accolade ornée d’une petite rosace ; dans la base de l’édicule se trouvait une autre armoirie (armoirie 4) (partie de … et de Jérusalem ?), côtoyée par deux têtes monstrueuses.
Il est donc plausible que l’édifice de Loudun, appartenant aux Dreux au moins dès le début du XVe siècle (Noyelle, Rouhaut 2002, p. 82), ait été restauré à cette époque et qu’il ait été destiné à loger des fonctionnaires représentant le pouvoir central, comme la maison aux armes royales placée de l’autre côté de la ville, prés de la porte Saint-Nicolas. En 1476, René d’Anjou fut contraint à signer un accord avec Louis XI, qui l’engagea à rendre la ville de Loudun à la couronne de France. Cet événement n’entraînât pas la disparition des armes du prince angevin.
Auteur : Matteo Ferrari
Pour citer cet article
Matteo Ferrari, Loudun, Maison du roi de Sicile, https://armma.saprat.fr/monument/maison-du-roi-de-sicile-loudun/, consulté
le 21/11/2024.
Bibliographie études
J.-A. Arnault-Poirier, « Monuments de l’arrondissement de Loudun », dans Mémoires de la Société des Antiquaires de l’Ouest, s. 3, t. 13, 1846, p. 67-293.
X. Barbier de Montrault, « Notre-Dame-de-Recouvrance à Loudun », dans Revue d’archéologie poitevine, 1, 1900, p. 1-32.
L. Lerosey, Loudun, histoire civile et religieuse, Loudun 1908.
C. de Mérindol, Le roi René et la seconde maison d’Anjou. Emblématique, art, histoire, Paris 1987.
L. Charbonneau-Lassay, Héraldique loudunaise, La Roche Rigault 1996.
B. Favreau, L. Bourgeois, « Loudun (Vienne) », dans Les petites villes du Haut-Poitou au Moyen Âge. Formes et monuments, sous la dir. de L. Bourgeois, Poitiers 2000, p. 39-65.
C. de Mérindol, « Armoiries et emblèmes dans les livres et chartes du roi René et de ses proches. Le rôle de Barthélemy d’Eyck », dans Splendeur de l’enluminure. Le roi René et les livres, catalogue de l’exposition (Angers 2009-2010), sous la dir. de M.-E. Gautier, Arles 2009, p. 151-165.
S. Noyelle, S. Rohaut, Histoire des rues de Loudun. Le long de la rue de la Porte-de-Chinon, Loudun 2002.
Photographies du monument
Armoiries répertoriées dans ce monument
Loudun, Maison du roi de Sicile. Armoirie René d’Anjou (armoirie 1)
Coupé : au premier tiercé en pal, au 1 fascé de (gueules) et d'(argent) [Hongrie], au 2 d'(azur) semé de fleurs de lis d'(or) au lambel de (gueules) [Naples], au 3 d'(argent) à la croix potencée d'(or), cantonnée de quatre croisettes de (même) [Jérusalem]; au deuxième parti, au 1 d'(azur) semé de fleurs de lis d'(or) à la bordure de (gueules) [Anjou], au 2 d'(azur) semé de croisettes d'(or) à deux bars adossés de (même) [Bar].
Attribution : Anjou, René Ier de
Timbre : Une couronne
Position : Extérieur
Étage : Rez-de-chaussée
Pièce / Partie de l'édifice : Façade
Emplacement précis : Pilier cornier
Structure actuelle de conservation : Pièce disparue
Loudun, Maison du roi de Sicile. Armoirie René d’Anjou (armoirie 2)
(Coupé : au premier tiercé en pal, au 1 fascé de (gueules) et d'(argent) [Hongrie], au 2 d'(azur) semé de fleurs de lis d'(or) au lambel de (gueules) [Naples], au 3 d'(argent) à la croix potencée d'(or), cantonnée de quatre croisettes de (même) [Jérusalem]; au deuxième parti, au 1 d'(azur) semé de fleurs de lis d'(or) à la bordure de (gueules) [Anjou], au 2 d'(azur) semé de croisettes d'(or) à deux bars adossés de (même) [Bar]).
Attribution : Anjou, René Ier de
Position : Extérieur
Étage : Rez-de-chaussée
Pièce / Partie de l'édifice : Tourelle d'escalier
Emplacement précis : Porte d'entrée
Structure actuelle de conservation : Pièce disparue
Loudun, Maison du roi de Sicile. Armoirie René d’Anjou (armoirie 3)
Coupé : au premier tiercé en pal, au 1 fascé de (gueules) et d'(argent) [Hongrie], au 2 d'(azur) semé de fleurs de lis d'(or) au lambel de (gueules) [Naples], au 3 d'(argent) à la croix potencée d'(or), cantonnée de quatre croisettes de (même) [Jérusalem]; au deuxième parti, au 1 d'(azur) semé de fleurs de lis d'(or) à la bordure de (gueules) [Anjou], au 2 d'(azur) semé de croisettes d'(or) à deux bars adossés de (même) [Bar].
Attribution : Anjou, René Ier de
Cimier : Un casque ? avec lambrequin ?
Position : Extérieur
Étage : 2ème étage
Pièce / Partie de l'édifice : Façade
Emplacement précis : Fenêtre
Support armorié : Lucarne
Structure actuelle de conservation : Pièce disparue