Dépendance de l’abbaye bénédictine de Luçon, érigée en évêché en 1317, l’église Saint-Laurent était la paroisse principale de la ville de Parthenay pendant les derniers siècles du Moyen Age, ce qui imposa de l’agrandir à maintes reprises (Blomme 1993, p. 232). Bâtie à la fin du XIe siècle, elle fut remaniée plusieurs fois au cours des siècles : la nef fut érigée vers le milieu du XIIe siècle, et le chœur fut refait au XIIIe siècle (Maxwell 2007, p. 24). Agrandie au XVe siècle par l’ajout du collatéral nord, elle fut encore modifiée dans la seconde moitié du XIXe siècle : de cette époque datent la construction du bas-côté sud (1851-1853), la réfection du clocher de croisée et des charpentes (1860), la reconstruction du clocher-porche (1875), réalisé à partir d’une structure d’origine romane.
Les éléments héraldiques sont essentiellement concentrés sur la partie occidentale de l’église, notamment sur le mur oriental du clocher (armoirie 1) et dans l’encadrement du portail latéral nord (armoiries 2-4). Un dernier écusson est visible à la base d’une niche, abritant jadis une statue, encastrée dans le pilier d’angle nord-est (armoirie 5).
Parthenay, église Saint-Laurent, clocher-porche, détail de l’armoirie de Arthur de Richemont.
L’écusson encastré sur la tour-porche (armoirie 1) au-dessus de la baie ouverte au niveau du premier étage porte les armes ante-susceptum d’Arthur III de Bretagne (sceau de 1423-1429 : base Sigilla), mieux connu sous le nom de connétable de Richemont qui, en 1415, obtint du roi la terre de Parthenay, auparavant confisquée à Jean II Larchevêque (l’armoire est ici dépourvue des neuf lionceaux qui en chargent d’habitude le lambel, peut-être effacés par le temps parce que peints à l’origine). Entré effectivement en possession de son bien en 1427, il le conserva jusqu’à sa mort, sans héritiers, en 1458 (Hélary 2012, p. 955-956; Baudry 2007). C’est donc dans cette fourchette chronologique que se situe la réalisation de notre écu ou, plus précisément entre 1427 et 1457 lorsqu’Arthur, devenu duc de Bretagne, pris les armes d’hermine plain. La provenance de l’écusson armorié est difficile à déterminer. Nous savons toutefois, d’après la description de l’édifice faite par Bélisaire Ledain avant que les travaux de réfection ne soient engagés (Ledain 1867, p. 49), qu’un écu aux armes du connétable était bel et bien encastré dans le pignon de l’ancien clocher-porche, juste au-dessous du clocheton qui le couronnait. Dans le relevé de la tour qui accompagne l’étude nous pouvons ainsi reconnaitre la trace d’un écusson situé à cet endroit (ibid., pl. 2). Même si dans un emplacement différent de l’actuel, les armes de Arthur de Bretagne timbraient donc le clocher avant sa reconstruction. Avec Ledain, nous pouvons en déduire que la tour fondée au XIe siècle avait été reprise et rehaussée à l’initiative du seigneur de Parthenay (ibid., p. 49; Ledain 1876, p. 222), donc dans le deuxième quart du XVe siècle.
Déjà daté de la fin du XVe siècle (Blomme 1993, p. 232), la construction du bas côté nord et de son portail en façade pourrait plutôt remonter à l’époque d’Arthur de Richemont qui s’était beaucoup engagé dans la réfection des église de la ville (Ochier 1956, p. 4-6 ; Baudry 2007, p. 33-35). Malheureusement, la plupart les écussons sculptés dans cette partie de l’édifice ne porte plus aucune trace des armoiries qui y étaient reproduites.
Parthenay, église Saint-Laurent, portail du bas-coté nord, écusson armorié (armoirie du prieuré Saint-Laurent ?).
Leur authenticité ne semble pourtant pas faire doute. Le portail et ses écussons (armoiries 2-4) sont en effet reproduits sur un relevé de l’édifice réalisé en 1858 – donc avant les travaux de restauration – à l’occasion des études pour la réfection des toitures et la restauration de l’édifice (Béja 1996, t. 3, fig. 27, 38, 40). Dans le dessin, nous pouvons même vérifier la composition de l’armoirie sculptée en saillie sur le linteau du portail et qui correspond à celle de l’armoirie encore visible aujourd’hui (armoirie 2). Cet écusson porte un gril, une allusion évidente à l’outil ayant servi au martyre de saint Laurent auquel l’église est dédiée. Nous pouvons donc supposer que l’écu contenait l’armoirie du prieuré de Saint-Laurent, dont l’existence est connue dès 1197 (Ledain 1867, p. 48). Appartenant au même ensemble architectural, les deux écus sculptés sur les pilastres qui encadrent la porte ne conservent aucune trace des armoiries (armoiries 3-4), probablement peintes, dont ils étaient chargés. Les deux écussons ornent des consoles jadis destinées à soutenir des statues disparues, comme c’était le cas de l’écu (armoirie 5), désormais vierge, encore visible sur l’angle nord-oriental de l’édifice, datant également de cette phase d’agrandissement de l’église.
L’ornementation héraldique de l’église Saint-Laurent ne se limitait pas aux surfaces externes. Elle continuait à l’intérieur comme cela arrivait toujours dans les édifices religieux qui était des lieux de sépulture. Notamment, un écusson timbre la clef de l’arcade située dans la troisième travée du même collatéral nord (armoirie 6). Illisible, il daterait par sa forme entre la seconde moitié du XVe siècle et le premier quart du XVIe siècle : d’après certains il ornait l’arcade de l’enfeu renfermant le tombeau de Jeanne d’Albret, seconde femme de Arthur III (morte en 1444), ou celle de la chapelle de Saint-Radegonde, réparée par Voyer d’Argenson, dont l’armoirie était encore visible au milieu du XIXe siècle « au sommet de l’arc ogivale » (Ledain 1867, p. 50). Surmonté par une console qui servait d’appui à une statue également perdue, il était accompagné par un deuxième écusson, de plus petite taille et également vierge, sculpté sur la surface externe de l’arcade (armoirie 7) (Ferrari 2021).
Auteur : Matteo Ferrari
Pour citer cet article
Matteo Ferrari, Parthenay, église Saint-Laurent, https://armma.saprat.fr/monument/eglise-saint-laurent-parthenay/, consulté
le 16/10/2024.
Bibliographie études
B. Ledain, Histoire de la ville de Parthenay, de ses anciens seigneurs et de la Gatine du Poitou, Paris-Poitiers 1858.
B. Ledain, « Notice sur l’église Saint-Laurent de Parthenay et sur un projet de restauration de sa partie antérieure », dans Mémoires de la Société des Antiquaires de l’Ouest, 32, 1867, p. 47-55.
Perlat, « Rapport sur la tour-porche de l’église Saint-Laurent de Parthenay et projet de restauration de cette partie de l’édifice », dans Mémoires de la Société des Antiquaires de l’Ouest, 32, 1867, p. 57-64.
B. Ledain, La Gâtine historique et monumentale, Paris 1876.
H. Ochier, « L’église Saint-Laurent et son chevet », dans Bulletin de la Société Historique et Archéologique des Amis de Parthenay, 5, 1956, p. 3-17.
M. Ferrari, « L’héraldique du connétable de Richemont : présences monumentales », dans Les seigneurs de Parthenay au Moyen Âge, catalogue de l’exposition (Parthenay 2021), Parthenay 2021, p. 178-183.
T. Béja, L’église Saint-Laurent de Parthenay (Deux-Sèvres), mémoire de maîtrise, dir. M.-T. Camus, Université de Poitiers, 1996.
Y. Blomme, Le Poitou gothique, Paris 1993.
M.-P. Baudry, Arthurde Richemont. Seigneur de Parthenay, connétable de France, duc de Bretagne, Poitiers 2007.
X. Hélary, « RICHEMONT Arthur de Bretagne, comte de (1393-1458) », dans Ph. Contamine, O. Bouzy, X. Hélary, Jeanne d’Arc. Histoire et dictionnaire, Paris 2012,p. 955-956.
Photographies du monument
Armoiries répertoriées dans ce monument
Parthenay, église Saint-Laurent. Armoirie Arthur de Richemont (armoirie 1)
D’hermine (Bretagne) au lambel à trois pendants de (gueules) (chargé de neuf lionceaux d’or ?).
Attribution : Bretagne, Arthur III de ; Richemont, Arthur de
Position : Extérieur
Pièce / Partie de l'édifice : Clocher-Porche
Emplacement précis : Mur ouest
Support armorié : Pierre sculptée
Structure actuelle de conservation : Déplacée dans le même monument