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ARmorial Monumental du Moyen-Âge
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Colombiers, église Notre-Dame

 

Documentée de 936 et connue sous le titre de la Vierge depuis l’an 1000 (Thibout 1952, p. 301), l’église Notre-Dame de Colombiers dépendait de l’abbaye de Nouaillé-Maupertuis. L’édifice actuellement visible est le fruit de plusieurs campagnes de construction et d’aménagement. Un chœur profond, composé d’une travée et d’une abside semi-circulaire, est suivi par une travée plus étroite, sur laquelle repose le clocher. Cette dernière marque aussi de passage entre le chevet et la nef, formée de quatre travées et dépourvue de bas-côtés. Même si elle conserve un aspect roman, l’église daterait en grande partie du début du XIIIème comme l’indiquent la forme des chapiteaux du chevet « archaïques, bien poitevins » (Labande-Mailfert, Belzeaux 1957, p. 35, num. 10) et les deux hauts-reliefs formant l’Annonciation disposés de part et d’autre de la baie axiale (Thibout 1952, p. 303-304).

Colombiers, église Notre-Dame, vue de la nef vers la travée sous le clocher.

Colombiers, église Notre-Dame, vue de la nef vers la travée sous le clocher.

Au XVème siècle, comme dans la plupart des édifices religieux de la région, un réaménagement important a touchée la nef, la partie la plus ancienne de l’église. Son intérieur fut rhabillé et la toiture, à l’origine charpentée, remplacée par des voûtes d’ogive. La reconstruction fut marquée, selon la coutume, par l’apposition des armoiries des commanditaires ou des financeurs du chantier sur les clefs de voûte des quatre travées (armoiries 1-4). Les écus sont tous orientés avec la pointe en direction de l’abside et du maître autel, la partie la plus important de l’édifice du point de vue fonctionnel et symbolique. Les deux premiers sont inscrits dans des cadres polylobés ornés aux extrémités de feuillages dans le respect des modèles flamboyant (à noter l’encadrement percé à jour de la clef de la deuxième travée). Les deux autres sont en revanche soutenus par des anges aux vestes larges et souples : l’emplacement de ces deux dernières armoiries et la nature céleste de leur tenant laisse croire à une volonté de marquer une hiérarchisation parmi les emblèmes représentés, tout en leur accordant une priorité à ceux placés du côté de l’abside.

Si l’identification de ces armoiries a demeuré jusqu’à présent mystérieuse, nous pouvons enfin jeter quelques jalons pour leur interprétation. Une clef d’accès à l’interprétation de la série est offerte par l’armoirie sculptée à la troisième travée (armoirie 3), aux trois pals de vair et chargée d’un chef dont la couleur n’est plus identifiable. Très semblable aux armes portées par les Blois-Châtillon et par les Archiac (qui ont toutefois deux seuls pals), elle devrait appartenir aux Marconnay, maison poitevine documentée à partir du XIème siècle qui portait de gueules aux trois pals de vair, au chef d’or (sur cette armoirie les Marconnay appuyèrent leurs prétentions, puis régentées, de descendre des Châtillon : De Courcelles 1831, p. 167).

Clef de voute à l'ange tenant un écu aux armes de Marconnay. Colombiers, église Notre-Dame

Clef de voûte à l’ange tenant un écu aux armes des Marconnay. Colombiers, église Notre-Dame.

Si les sceaux connus documentent de l’instabilité de l’armoirie familiale jusqu’à 1572, avec une prédilection pour le palé de six pièces ou pour les deux pals de vair (De Courcelles 1831, p. 164-167), il faudra de même noter qu’Estèle de Marconnay († avant 1389), chevalier banneret, adoptait un sceau à trois pals de vair, au chef chargé d’un oiseau à senestre et d’un lambel à deux pendents (Beauchet-Filleau 1976, p. 507; Eygun 1938, p. 228, num. 469). Si cette armoirie aurait pu se transmettre à d’autres membres de la famille, sa présence dans l’église de Colombiers n’est pas surprenante. Nous savons en effet qu’en 1421 Jean de Marconnay († avant 1459 : ibid., p. 493), sur la base des droits acquis par son mariage avec la fille ainée de Briand de Colombiers, s’était emparé de la seigneurie et du château de Colombiers que sa belle-sœur Jeanne Briand prétendait d’occuper après la mort de son époux, Jean dit Blondeau seigneur de Colombiers (Guérin 1898, p. 157, MLVIII). Telle identification semble par ailleurs confirmée par le fait que les détenteurs de la seigneurie de Colombiers vantaient le droit de patronage sur son prieuré, son église et sa chapelle (Lalanne 1859, p. 401).

Clef de voûte à l'ange tenant un écu aux armes des Colombiers. Colombiers, église Notre-Dame.

Clef de voûte à l’ange tenant un écu aux armes des Colombiers. Colombiers, église Notre-Dame.

Le bouclier armorié qui orne la clef de voûte successive (armoirie 4) permet à notre avis de circonscrire la chronologie de la réfection de l’église à l’époque de Jean de Marconnay, plutôt qu’à celle de Simon, son fils et successeur († avant 1497), ou René, fils de ce dernier († 1516) (Beauchet-Filleau 1976, p. 494). Soutenu lui aussi par un ange et placé en proximité du chevet de l’église, l’écusson est très probablement à interpréter en continuité avec l’écu qui le précède. Nous constatons ainsi que Briand de Colombiers († après 1383), seigneur du lieu, utilisait déjà un sceau portant un écu chargé d’un chef à trois colombes (Beauchet-Filleau 1895, p. 578-579; Eygun 1938, p. 198, num. 261) : il était le père de Jean dit Blondeau de Colombiers, beau frère de Jean de Marconnay (Guérin 1898, p. 157, MLVIII). Il s’agirait donc soit des armes propres du fief de Colombiers, utilisées par tous ses détenteurs dans l’exercice de leurs fonctions, soit de celles de la famille de la femme de Jean de Marconnay, représentées dans l’objectif de restituer l’image du couple et d’affirmer la légitime transmission de la seigneurie. Il faudra de meme noter que Louis de Marconnay, fils de Réné, utilisait un sceau chargé d’un écu à trois pals au chef (Eygun 1938, p. 228, num. 471)

L’identification des armories sculptées sur les deux premières clefs de voûte (armoiries 1, 2) aurait surement permis de préciser davantage l’attribution des armes Marconnay-Colombiers et la chronologie de l’intervention architecturale. Malheureusement, pour le moment, il n’a pas été possible d’atteindre une solution convaincante. De même, il faudra noter que les Libault portaient une armoirie tout à fait similaire à celle visible sur la seconde clef de voûte (armoirie 2) : d’argent à six fleurs de lys de gueules, posées 3, 2, 1, au chef de gueules chargé de trois fers de lance d’argent (Briant de Laubrière 1844, p. 190). Toutefois, bien qu’un Nicole Libault soit mentionné en janvier 1488 dans un acte de rémission en compagnie d’un Jean de Marconnay (Celier 1938, p. 108), nous n’avons pas pu établir s’il existait un lien entre cette famille bretonne et le territoire poitevin ou la famille qui détenait la seigneurie de Colombiers. De même, nous n’avons pas pu identifier l’armoirie ouvrant la série (armoirie 1).

Auteur : Matteo Ferrari

Pour citer cet article

Matteo Ferrari, Colombiers, église Notre-Dame, https://armma.saprat.fr/monument/eglise-notre-dame-colombiers/, consulté le 21/11/2024.

 

Bibliographie sources

P. Guérin (éd.), Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la chancellerie de France, t. VIII, 1431-1447, Poitiers 1898 (Archives historiques du Poitou, t. 29) (ed. cons <www.corpus.enc.sorbonne.fr>).

L. Celier (éd.), Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la chancellerie de France, t. XIII, 1483-1492, Poitiers 1938 (Archives historiques du Poitou, t. 50).

Bibliographie études

J.-B. P.-J. De Courcelles, Histoire généalogique et héraldique des pairs de France, des grands dignitaires de la couronne, des principales familles nobles du royaume et des maisons princières de l’Europe, t. XI, Paris 1831.

L. Briant de Laubrière, Armorial général de Bretagne, Paris 1844.

Ch.-C. Lalanne, Histoire de Chatelleraud et du Chatelleraudais, t. I , Chatellerault 1859.

H. Beauchet-Filleau, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, t. 2, Poitiers 1895.

F. Eygun, Sigillographie du Poitou jusqu’en 1515, Poitiers 1938.

M. Thibout, « Colombiers », dans Congrès archéologiques de France, t. 109, Poitiers (1951), Paris-Orléans 1952, p. 301-308.

Y. Labande-Mailfert, P. Belzeaux, Poitou roman, Saint-Léger-Vauban 1957.

J. Beauchet-Filleau, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, t. VI, Fontenay-le-Comte 19762.

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Colombiers, église Notre-Dame. Armoirie inconnue (armoirie 1)

De… à deux burelles de… à une bande (ou bâton) de…, chargé d’une coquille de…, brochant sur le tout.

  • Attribution : Armoirie inconnue
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Nef
  • Emplacement précis : travée Ière ; Voûte
  • Support armorié : Clef de voûte
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Sculpture en pierre
  • Période : 1451-1475 ; 1476-1500
  • Dans le monument : Colombiers, église Notre-Dame

Eglise Notre-Dame, Colombiers. Armoirie inconnue (armoirie 2)

De … à six fleurs de lys de …, posées 3, 2, 1, au chef de … chargé de trois fers de lance de …

  • Attribution : Armoirie inconnue
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Nef
  • Emplacement précis : travée IIème ; Voûte
  • Support armorié : Clef de voûte
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Sculpture en pierre
  • Période : 1451-1475 ; 1476-1500
  • Dans le monument : Colombiers, église Notre-Dame

Colombiers, église Notre-Dame. Armoirie Marconnay (armoirie 3)

De (gueules) à trois pals de vair, au chef d'(or).

  • Attribution : Marconnay, famille
  • Tenants / Supports : Un ange
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Nef
  • Emplacement précis : travée IIIème ; Voûte
  • Support armorié : Clef de voûte
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Sculpture en pierre
  • Période : 1451-1475 ; 1476-1500
  • Dans le monument : Colombiers, église Notre-Dame

Eglise Notre-Dame, Colombiers. Armoirie Colombiers (armoirie 4)

De … au chef de … chargé de trois colombes de …

  • Attribution : Colombiers, famille
  • Tenants / Supports : Un ange
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Nef
  • Emplacement précis : travée IVème ; Voûte
  • Support armorié : Clef de voûte
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Sculpture en pierre
  • Période : 1451-1475 ; 1476-1500
  • Dans le monument : Colombiers, église Notre-Dame

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