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ARmorial Monumental du Moyen-Âge
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Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne

 

La cathédrale actuelle de Châlons-en-Champagne succède à un édifice roman jugé trop modeste pour recevoir les nombreux fidèles. Une première phase de travaux débuta vers 1120, presque concurremment au chantier de la collégiale Notre-Dame-en-Vaux. La tour nord du transept est un vestige de cette période de reconstruction. Le chœur fut transformé par l’adjonction d’un déambulatoire et les chapelles rayonnantes entre 1280 et 1310. Les façades des croisillons furent transformées au XIVe siècle et la nef achevée aux XVe et XVIe siècles. Claude Monnart donna le dessin de la façade classique qui s’inspire de celle de Saint-Gervais-Saint-Protais de Paris ; elle fut érigée entre 1628 et 1634 (Villes 2007). Une importante série de vitraux, certains armoriés, orne l’édifice ; l’un d’eux, daté du XIIe siècle, figure parmi les plus anciens conservés dans la région (Balcon 1998). De même, un grand nombre de pierres tombales complète le décor de la cathédrale.

Epitaphe aux armes de Jean de Gaucourt. Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Etienne.

Fixée au mur ouest du transept nord du bâtiment, se trouve une pierre inscrite, datée de 1416, qui suscite un intérêt particulier. Tracée en lettres minuscules gothiques peintes en noir et encadrée d’une frise végétale, elle porte un texte en ancien français qui rappelle l’institution de quatre messes perpétuelles en cette même cathédrale, à l’autel de Notre Dame, par Jean de Gaucourt († avant 1436 : De la Chenay-Desbois 1866, col. 30), archidiacre de Joinville (Haute-Marne). Jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, l’évêché de Châlons-en-Champagne englobait en effet une partie de l’actuel département de la Haute-Marne jusqu’à la ville de Joinville et de ses alentours. Le texte de l’inscription ne laisse aucun doute sur la nature de cette plaque, parfois à tort considérée comme funéraire (base POP) sans doute sur la base d’une mauvaise interprétation de François Rogier de Gaignières (Oxford, Gough drawings Gaignières 11, f. 18 : Collecta). Nous en proposons la lecture suivante :

« Noble homme maistre Jehan de Gaucourt archidiacre de Joinville en ceste église / chanoine dicelle et de Narbone seigneur en partie de Maisons-sur-Seine-lez-/Argenteuil de la Grange-Menecier-en-Brie et de Aciuval a fondé à lautel de / Nostre-Dame cy devant quatre messes perpétueles pour luy son père sa mère / parens amis et bienfaiteurs à chanter et célébrer chascune sepmaine / par les chapellains de lancienne congrégacion de céans et se doivent dire de/puis la première pulsacion de prime iusques au commencement de / chanter prime cest assavoir lundi de requiem le mercredi du Saint-/Esprit tant come il vivera et après son décès ce requiem le venredi de la / Croix le dimanche de la dominique se il nest feste solenne ou de nuef lecons et / adont pourront chanter selond leur dévocion tous les quatre iours et fut / faicte la dicté fondacion lan de grâce N(ot)re S(eigneur) mil CCCC et XV le dimenche sezièsme / iour de février premier dimanche de la septuagesime avec ce a fondé en lesglise / de céans ung obit solenne perpétuel pries Dieu pour luy ».

L. Boudan, Epitaphe aux armes de Jean de Gaucourt dans la cathèdrale de Chalon-en-Champagne. Oxford, Gough drawings Gaignières 11, f. 18 (Collecta).

Issu d’une honorable lignée, second enfant d’une fratrie de cinq, Jean de Gaucourt, qui se déclare vivant au moment de la gravure de l’inscription, porte le prénom de son père, Jean Ier († 1393), sa mère étant Jeanne de Farainville († après 1402). Son frère aîné, Raoul V de Gaucourt († 1417), fut bailli de Rouen et le fils de ce dernier, Raoul VI, combattit les Anglais aux côtés de Jeanne d’Arc lors du siège d’Orléans et de la bataille de Patay. L’inscription conservée à Châlons-en-Champagne témoigne de l’armoirie portée par l’archidiacre. Chaque angle de la pierre inscrite est en effet orné d’un écusson armorié (armories 1a-d). Seul l’écu armorié placé au coin supérieur gauche reste cependant lisible de nos jours (armoirie 1a), les autres étant partiellement ou totalement effacés. Des photographies anciennes (base POP) et surtout le relevé de Louis Boudan (Oxford, Gough drawings Gaignières 11, f. 18 : Collecta) permet toutefois d’avoir un aperçu de l’inscription dans son état d’origine et de reconnaître ainsi la présence, sur les trois écus abîmés, de mêmes armes à deux bars adossés, accompagnés d’un aigle en chef et posés sur un champ d’hermine (armoiries 1b-d). Le dessin de Boudan nous apprend également que, à la fin du XVIIe siècle, le cadre de l’inscription portait encore des traces évidentes de la polychromie d’origine. Celle-ci a désormais totalement disparue, mais des traces ont pu être encore décelées (base POP), notamment sur la surface des écussons : de l’argent a été reconnu sur les bars et sur le fond, tandis qu’une teinte rouge a été détectée sur la bordure engrêlée (l’argent ne saurait être reconnu ici comme un des deux métaux héraldiques, mais comme un apprêt destiné à rehausser l’ensemble des pigments utilisés pour colorer les armoiries).

Cette inscription armoriée témoigne ainsi du fait que Jean de Gaucourt, en tant que fils cadet de Jean Ier, utilisait une surbrisure de l’armoirie familiale (un semé d’hermine à deux bars adossés en pal de gueules : base Sigilla). En effet, dans l’armorial de Coutances, daté du début du XVe siècle, les armes des Gaucourt brisées par l’ajout d’un aigle en chef sont attribué à un tel Raoul de Gaucourt, probablement à identifier avec Raoul V († 1417), frère ainé de Jean (Coutances, BM, ms. 8, f. 81v). En tant que cadet, donc, ce dernier surbrisait les armes de la famille en rajoutant une bordure engrêlée.

La famille existe encore lorsque la Révolution éclate. Elle porte alors : « d’hermines à deux barbeaux adossés de gueules ». Le cimier en forme de grue, utilisé entre la fin du Moyen Âge et le début de l’époque moderne, comme nous pouvons le constater sur les sceaux de Raoul (VI ?) de 1415 (Sigilla) et de 1446 (Sigilla), était alors devenu une tête de canard (Palasi 2005, num. 420).

Auteur : Jean-Luc Liez

Pour citer cet article

Jean-Luc Liez, Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne, https://armma.saprat.fr/monument/chalons-en-champagne-cathedrale-saint-etienne/, consulté le 29/10/2025.

 

Bibliographie sources

Coutances, Bibliothèque Municipale, ms. 8.

Bibliographie études

Balcon, Sylvie, « Les vitraux de la cathédrale de Châlons-sur-Marne », Bulletin Monumental, 156-2, 1998, p. 200-202.

De la Chenay-Desbois François-Alexandre Aubert, Dictionnaire de la noblesse, t. 9, Paris 1866.

Palasi, Philippe, Armorial historique et monumental de la Haute-Marne, XIIe-XIXe siècles, Chaumont 2005.

Villes Alain, La cathédrale Saint-Étienne de Châlons-en-Champagne et sa place dans l’architecture champenoise, Langres 2007.

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne. Armoirie Gaucourt (brisure) (armoirie 1a)

D’hermines à deux bars adossés de (gueules) accompagnés d’une aigle d'< azur > posée au point du chef, à la bordure engrêlée de (gueules).

  • Attribution : Gaucourt Jean de
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Transept (bras nord)
  • Emplacement précis : Mur ouest
  • Support armorié : Inscription
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Sculpture en pierre polychrome
  • Période : 1401-1425
  • Dans le monument : Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne

Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne. Armoirie Gaucourt (brisure) (armoirie 1b)

D’hermines à (deux) bars adossés de (gueules) accompagnés d’une aigle d'<azur> posée au point du chef, à la bordure engrêlée de (gueules).

  • Attribution : Gaucourt Jean de
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Transept (bras nord)
  • Emplacement précis : Mur ouest
  • Support armorié : Inscription
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Sculpture en pierre polychrome
  • Période : 1401-1425
  • Dans le monument : Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne

Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne. Armoirie Gaucourt (brisure) (armoirie 1c)

D’hermines (à deux bars adossés de gueules accompagnés d’une aigle d'<azur>, posée au point du chef), à la bordure engrêlée de (gueules).

  • Attribution : Gaucourt Jean de
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Transept (bras nord)
  • Emplacement précis : Mur ouest
  • Support armorié : Inscription
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Sculpture en pierre polychrome
  • Période : 1401-1425
  • Dans le monument : Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne

Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne. Armoirie Gaucourt (brisure) (armoirie 1d)

(D’hermines à deux bars adossés de gueules, accompagnés d’une aigle d'< azur >, posée au point du chef), à la bordure engrêlée de (gueules).

  • Attribution : Gaucourt Jean de
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Transept (bras nord)
  • Emplacement précis : Mur ouest
  • Support armorié : Inscription
  • Structure actuelle de conservation : In situ
  • Technique : Sculpture en pierre polychrome
  • Période : 1401-1425
  • Dans le monument : Châlons-en-Champagne, cathédrale Saint-Étienne

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