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ARmorial Monumental du Moyen-Âge
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Auteuil, église Notre-Dame de l’Assomption

 

Probablement construite vers la fin du XIIe siècle, l’église paroissiale d’Auteuil fut agrandie et transformée à diverses reprises, notamment au XVIe et au XVIIIe siècle. Formée par un chœur peu étendu, une nef rectangulaire flanquée par un seul collatéral et par une chapelle s’ouvrant sur le côté gauche du chevet, elle fut détruite en 1878 parce qu’inadaptée aux exigences d’une population qui avait énormément augmentée. A cette époque elle ne conservait de la structure médiévale que le portail et la tour clocher (Raunié 1890, p. 252).

Clef de voûte aux armes de Jeanne de Ghistelles, Paris, Musée Carnavalet.

Au moment de la destruction de l’édifice un fragment de clef de voûte armorié (33cm x 36 cm) fut déposé et sauvegardé (armoirie 1). Il est maintenant conservé au Musée Carnavalet de Paris (inv. AP 232). La clef est chargée d’un écusson mi-parti, encadré par une rosace polylobée ajourée. Des traces de polychromie rouge sont visibles notamment sur la surface de l’écu (notice du Musée), mais il est improbable qu’elles appartiennent à la phase de réalisation de l’armoirie (la couche de teinture semble avoir intéressée de la même manière le fond comme les meubles de l’armoirie). Comme Jean-Pierre Willesme l’avait justement remarqué (1979, p. 221, num. 156), il s’agit de l’armoirie de Jeanne de Ghistelles (Van Gistel), dame d’Esquelbecq et de Landreghem : elle associe en effet les armes de son époux (à dextre), Louis d’Halluin (Hallwyn/van Halewijn) († 1519 : Louette 1847), à celles de son père, Jean III de Ghistelles (à senestre).

Jean I Penicaud, L’Annonciation, détail de l’écu aux armes de Jeanne de Ghistelles (Havard 1894, p. 378).

Louis d’Halluin brisait l’armoirie familiale (d’argent à trois lions de sable, armés, lampassés et couronnés d’or: Paris, BnF, ms. Fr. 5230, f. 36r) avec un écusson d’azur à la fasce d’or accompagnée de six billettes du même, placé en abîme (Halluin de Piennes), comme l’attestent certaines pages de son livre d’Heures, réalisé vers 1500 par l’enlumineur Robert Boyvin (San Marino CA, Huntington Library, ms. HM 1171 : Deuffic 2012). Ses armes sont notamment reproduites, entourées du collier de l’Ordre de Saint-Michel qu’il reçut en 1495, au-dessous des enluminures représentant la Trahison de Judas (f. 29) et l’Annonciation aux bergers (f. 61), mais aussi sur la veste que Louis, représenté en prière, porte dans la scène de l’Annonciation à la Vierge (f. 37v) (mais voir aussi Paris, BnF, ms. Fr. 841, f. 3v). Quant à eux, les Ghistelles d’Esquelbecq brisaient l’armoirie familiale (de gueules au chevron d’hermine : Paris, BnF, ms. Fr. 5230, f. 36r) par l’ajoute de trois étoiles d’or, deux en chef et une en pointe.

Les armes de Louis et de Jeanne, figurant les unes à côtés des autres dans une enluminure du livre d’Heures de Louis de Roncherolles (Paris, Arsenal ms. 1191, f. 103), sont associées dans la forme d’un parti, soutenu par deux anges, dans une plaque émaillée avec l’Annonciation à la Vierge attribuée à Jean I Penicaud et actuellement perdue (Havard 1894, p. 378, cité par Deuffic 2012). La forme à losange de l’écu, habituellement utilisée dans l’héraldique féminine, confirme qu’il s’agit des armes portées par Jeanne de Ghistelles après son mariage, célébré vers 1475 (Jean, deuxième fils du couple et héritier de la terre d’Esquelbecq, utilisa en revanche un écartelé aux armes de ses parents : Archives dép. Eure, ms. G 2120, f. 69v, reproduit par Hamon 2008, p. 52).

Armoiries de Louis d’Halluin et de Jeanne de Ghistelles. Paris, Arsenal ms. 1191, Heures de Louis de Roncherolles, f. 103.

Cette date doit donc être retenue comme terminus post quem pour la réalisation de la pièce sculptée aujourd’hui au Musée Carnavalet, qui a été en effet déjà datée de la fin du XVe siècle (Willesme 1979, p. 221). Il n’est pas exclu toutefois qu’elle soit un peu plus tardive remontant au début du XVIe siècle, peut-être juste avant la nomination, en 1512, de Louis d’Halluin à gouverneur et lieutenant général en Picardie. A partir de cette date les intérêts de Louis semblent en effet se déplacer loin de Paris, comme le prouve son intervention dans la construction de l’église de Maignelay (Oise). Cet édifice a été daté des années 1503-1514 sur la base des armoiries qui y sont représentées, parmi lesquelles se trouvent celles de Louis et de sa femme Jeanne (Ansar 1981, p. 1012 et p. 1016 ; Id. 2013). Il est donc plausible que le fragment de clef de voûte conservé au Musée Carnavalet provienne des parties de l’église d’Auteuil, village dans lequel Louis d’Halluin avait des propriétés dès le début des années 1480 (Dumolin 1931, p. 26), refaites au début du XVIe siècle (Raunié 1890, p. 252), vraisemblablement une chapelle latérale (notice du Musée) ou le chœur.

Auteur : Matteo Ferrari

Pour citer cet article

Matteo Ferrari, Auteuil, église Notre-Dame de l’Assomption, https://armma.saprat.fr/monument/auteuil-eglise-notre-dame-de-lassomption/, consulté le 06/12/2024.

 

Bibliographie sources

Archives dép. Eure, ms. G 2120, Gisors, martyrologe de l’Assomption.

Paris, Arsenal ms. 1191, Heures de Louis de Roncherolles.

Paris, BnF, ms. Fr. 841, Martin Le Franc, Le Livre du champion des dames.

Paris, BnF, ms. Fr. 5230, Armorial Bellenville.

San Marino CA, Huntington Library, ms. HM 1171, Heures de Loys de Halewyn (Louis d’Halluin).

Bibliographie études

Ansar, Patrick, « L’église de Maignelay (Oise). Témoin du mécénat de Louis d’Halluin en Picardie », Revue du Nord, 251, 1981, p. 1009-1017.

Ansar, Patrick, L’église et la chapelle Sainte-Marie-Madeleine de Maignelay – Oise, Paris 2013.

Deuffic, Jean-Luc, « Les Heures de Loys de Halewyn (Louis d’Halluin, + 1519), chambellan de Louis XI … », <  http://blog.pecia.fr/post/2012/01/12/Les-Heures-de-Louis-d-Halluin-%28-1519%29-%3A-San-Marino%2C-Huntington-Library%2C-H-1171 >, cons. le 31/10/2018.

Hamon, Etienne, Un chantier flamboyant et son rayonnement. Gisors et les églises du Vexin français, Besançon 2008.

Havard, Henry, Dictionnaire de l’ameublement et de la décoration depuis le XIIIe siècle jusqu’à nos jours, t. 2, Paris, Maison Quantin, 1894.

Louette, Abbé, « Les funérailles de Louis d’Hallouin », Bulletin de la commission archéologique du diocèse de Beauvais, 2, 1847, p. 51-64.

Raunié, Emile, Epitaphier du vieux Paris, t. 1, Saint-André-des-Arcs, Saint-Benoît, Paris 1890.

Dumolin, Maurice, « Claude Chahu, seigneur de Passy », Bulletin de la Société d’histoire de Paris et de l’Île-de-France, 58, 1931, p. 11-39.

Willesme Jean-Pierre, Catalogues d’art et d’histoire du Musée Carnavalet, I. Sculptures médiévales (XIIe siècle-début du XVIe siècle), Paris 1979.

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Auteuil, église Notre-Dame de l’Assomption. Armoirie Jeanne de Ghistelles (armoirie 1)

Mi-parti, au premier d’(argent), à trois lions de (sable) armés, lampassés de (gueules) et couronnés d’(or), chargé en abîme d’un écusson d’(azur) à la fasce d’(or), accompagnée de six billettes d’(or), trois en chef et trois en pointe (Halluin/Hallwyn/van Halewijn) ; au deuxième, de (gueules) au chevron d'(hermine), accompagné de trois étoiles d’(or), deux en chef et une en pointe (Ghistelles).

  • Attribution : Ghistelle, Jeanne de
  • Position : Intérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Inconnue
  • Emplacement précis : Voûte
  • Support armorié : Clef de voûte
  • Structure actuelle de conservation : Paris, Musée Carnavalet
  • Technique : Sculpture en pierre polychrome
  • Période : 1476-1500 ; 1501-1525
  • Dans le monument : Auteuil, église Notre-Dame de l’Assomption

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