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ARmorial Monumental du Moyen-Âge
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Clermont-en-Beauvaisis, Maison du receveur

 

Essentiel au bon fonctionnement de l’administration princière, le receveur était l’officier en charge des affaires financières locales : il recevait les cens, tailles, rentes, amendes et gérait les dépenses pour l’entretien ou la réparation des édifices publics. Parfois chargé de missions diplomatiques, le receveur se devait de connaitre intimement la région et les habitants qui étaient de son ressort (Mattéoni 1998, chap. IV). Le prestige de son office et la place qu’il occupait dans la gestion des affaires de la principauté en faisaient un personnage d’importance particulière et le décor de son habitation devait donc le distinguer du reste de la population. Bien qu’il n’en reste aujourd’hui aucun vestige, la demeure que le receveur du duc Charles de Bourbon († 1527) occupait à Clermont-en-Beauvaisis est brièvement décrite dans un document judiciaire du début du XVIe siècle, indiquant l’existence d’un décor emblématique sur sa façade.

En effet, le 26 juillet 1527, plus de deux mois après la mort du connétable de Bourbon, le Parlement de Paris rend une sentence post mortem à l’encontre de celui-ci, ordonnant l’abolition de sa mémoire, la confiscation de tous ses biens et la destruction de ses armoiries et de ses emblèmes sur l’ensemble de ses territoires (Robin 2021). Le procès-verbal de cette exécution, réalisée entre septembre 1527 et janvier 1528, décrit avec précision la démarche des officiers lors de leur expédition à travers le royaume afin d’y faire appliquer la sentence. On apprend ainsi que lors de leur second passage à Clermont, le 20 septembre, les officiers sont informés de la présence d’armoiries de Bourbon sur une « maison aupres du Chasteau dudit lieu » (Paris, BnF, ms. Fr. 18447, f. 125). La demeure est identifiée comme ayant appartenue au receveur de la ville, alors décédé. Elle était décorée « en la porte de devant et front d’icelle maison des armoiries faictes du temps dudict Charles jadis de Bourbon & appropriées a sa personne autour desquelles armoiries y avoit des espées entrelassées » (ibid.) (armoirie 1). Le décor fut intégralement détruit sur ordre des parlementaires.

Ces « espées entrelassées » faisaient peut-être référence à la devise de l’épée flamboyante du connétable de Bourbon (base DEVISE), elle-même inspirée d’une devise de son homonyme et parent le cardinal Charles de Bourbon († 1488) (base DEVISE). La présence de cet emblème sur le fronton de la maison permettrait ainsi de resserrer la fourchette de datation entre 1515, plus vieille attestation de la devise, lors de l’entrée royale de François Ier à Paris, au retour de son sacre (Godefroy 1649, p. 266), et 1523, date à laquelle le connétable fuit le royaume pour rejoindre les rangs de l’empereur Charles Quint. Ces « espées entrelassées » pouvaient également faire référence à une combinaison d’emblèmes : la ceinture Espérance (base DEVISE), devise familiale des Bourbons, s’enroulant autour de l’épée de connétable du duc. Cette composition est connue par un exemplaire de l’« Institution et administration de la chose publique » de Francesco Patrizi, réalisé pour Charles en 1520, où elle figure dans les marges de plusieurs pages (BnF, RLR, Vélins 410, fol. siglé a. ; Artignan 2022, p. 321-324 ; Mattéoni 2022, p. 253-254). En outre, d’autres décors rasés par les parlementaires lors de leur expédition montraient également des épées entrelacées de ceintures, comme sur les vitraux de l’église de La Hérelle, sur la porte de la ville et dans la chapelle d’Aigueperse ou sur la tour de l’horloge d’Ardes.

Ce type de manifestation héraldique monumentale, illustrant le transfert de l’autorité ducale à l’un des officiers les plus importants de l’administration, pouvait également s’observer ailleurs dans la principauté comme en témoigne la mention d’un autre décor aux armes du connétable sur la maison du receveur de Villefranche-sur-Saône.

Auteur : Antoine Robin

Pour citer cet article

Antoine Robin, Clermont-en-Beauvaisis, Maison du receveur, https://armma.saprat.fr/monument/clermont-en-beauvaisis-maison-du-receveur/, consulté le 28/03/2024.

 

Bibliographie sources

Paris, BnF, ms. Fr. 18447, Procès criminel du connestable [Charles] de Bourbon » et de ses complices (1523-1533).

Godefroy Théodore, Le ceremonial françois ou description des ceremonies, rangs et seances, observees en France en divers Actes, & Assemblées solennelles, Paris 1649.

Bibliographie études

Artignan Aurore, Marquer sa possession au Moyen Âge d’après les livres des Bourbon. Catalogue des signes d’appartenance dans les ouvrages des bibliothèques de la famille ducale de Bourbon, d’après les inventaires médiévaux de Moulins et d’Aigueperse, mémoire de recherche, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2022.

Mattéoni Olivier, « Charles III de Bourbon et Suzanne de Bourbon. Le livre comme défense » dans O. Mattéoni (dir.), Les Bourbons en leur bibliothèque (XIIIe-XVIe siècle), Paris 2022.

Mattéoni Olivier, Servir le prince. Les officiers des ducs de Bourbon à la fin du Moyen-Âge (1356-1523), Paris 1998.

Robin Antoine, « Emblematic iconoclasm. The case of Charles of Bourbon in 1527 », dans S. Thiry, L. Duerloo (dir.), Heraldic hierarchies. Identity, status and state intervention in early modern heraldry, Leuven 2021, p. 191-211.

Photographies du monument

Armoiries répertoriées dans ce monument

Clermont-en-Beauvaisis, Maison du receveur. Armoirie Charles III de Bourbon (armoirie 1)

(D’azur à trois fleurs de lis d’or, au bâton de gueules en bande brochant).

  • Attribution : Bourbon Charles III de
  • Devise : Epées flamboyantes ou entrelacées d’une ceinture.
  • Position : Extérieur
  • Pièce / Partie de l'édifice : Façade
  • Emplacement précis : Inconnu
  • Support armorié : Inconnu
  • Structure actuelle de conservation : Pièce disparue
  • Technique : Inconnue
  • Période : 1501-1525
  • Dans le monument : Clermont-en-Beauvaisis, Maison du receveur

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